L’élément clé du processus de capture du jeu reste précisément le jeu de l’acteur, c’est-à-dire sa façon de se déplacer et d’incarner un personnage. Si celui de Gollum fonctionne aussi bien dans Les Deux Tours et Le Retour du roi, c’est surtout en raison de la personnalité nerveuse et irritable qu’a imaginée Andy Serkis. Pour les besoins du Nouveau Royaume, l’acteur Owen Teague a étudié les mouvements des singes dans un sanctuaire de primates pour apporter de l’authenticité à son jeu.
Quand Andy Serkis a annoncé aux médias son prochain Seigneur des anneaux, intitulé The Hunt for Gollum, il a confié que la technologie était pour lui libératrice. « Elle a atteint un niveau où l‘auteur du jeu permet de l’intérioriser davantage sans avoir besoin de surjouer, a-t-il expliqué. On est clairement à un niveau de détail bien plus avancé aujourd’hui. »
Cependant, à ses yeux, le fait qu’un réalisateur puisse regarder aujourd’hui une scène sur une tablette pendant qu’elle est jouée, le rig étant appliqué aux données de capture du jeu en temps réel, peut aussi représenter un risque. « Un réalisateur n’a pas besoin de se concentrer sur l’aspect simiesque, car la post-production permet toutes sortes d’ajustements, comme rendre un personnage plus grand ou mieux le placer dans l’image. En revanche, il doit vraiment se concentrer sur les nuances exprimées par le visage de l’acteur, ses micro-ajustements les plus subtils. J’aurais peur de lisser toutes les aspérités qui font du jeu d’un acteur ce qu’il est. Quand un réalisateur a le nez dans sa tablette à regarder une approximation à laquelle un rig facial basse résolution est appliqué en temps réel, il ne voit pas ces nuances. Il n’a donc pas les informations nécessaires pour décider si c’est la cinquième ou la sixième prise qui est la bonne. »
Pour Erik Winquist, quels que soient les progrès de la technologie, le réalisateur et les animateurs doivent réellement voir ce que l’acteur donne, car de subtils mouvements oculaires de quelques pixels seulement suffisent à exprimer des sentiments complexes.
Il existe un équilibre où coexistent la capture de jeu sur le plateau et l’augmentation CGI en postproduction. « À certains moments, on doit inventer quelque chose que le réalisateur n’a pas obtenu le jour du tournage pour une raison quelconque, poursuit Erik Winquist. On dit que le film se fait vraiment en salle de montage et souvent, on entend : ´Si nous avions su ce que nous savons maintenant, nous aurions tourné cette scène autrement. Au fait, Wētā FX, vous pouvez nous aider ?´ ».
Encore une fois, tout revient au jeu de l’acteur. « Nos animateurs ont un talent fou, mais entre un réalisateur et un acteur, il se passe quelque chose, souligne-t-il. C’est dans cet espace-là, à ce moment-là, qu’il y a expérimentation. Si on la passe aux effets visuels, il y a toujours un décalage avant de livrer la nouvelle version, même de deux heures. Entre-temps, on a perdu cette magie unique du plateau, cette spontanéité. »