Bois autoformé : les nouvelles techniques naturelles pour cintrer du bois

Cintrer du bois est énergivore et nécessite des machines lourdes, mais les scientifiques ont découvert un procédé naturel incitant le bois à s’autoformer.


La tour d’Urbach, au sud-ouest de l’Allemagne, a été construite avec du bois autoformé. Unique en son genre, elle a été érigée dans le cadre d’une exposition horticole.

La tour d’Urbach, au sud-ouest de l’Allemagne, a été construite avec du bois autoformé. Unique en son genre, elle a été érigée dans le cadre d’une exposition horticole.

Friederike Voigt

4 mai 2021

min de lecture

Cintrer du bois est généralement énergivore et nécessite de recourir à de la machinerie lourde. Mais désormais, les scientifiques ont découvert un moyen naturel de procéder, et sont capables de définir, précisément et à l’avance, la forme d’une pièce à l’aide d’outils numériques. De toutes nouvelles perspectives plus durables s’ouvrent alors aux architectes.

La tour d’Urbach, située sur une petite colline au sud-ouest de l’Allemagne, est entourée de vignes et de champs. Construite en 2019 dans le cadre d’une exposition horticole, sa structure caractéristique est devenue emblématique de la région. C’est aussi un manifeste pour l’architecture de demain, car sa façade courbe représente un véritable changement de paradigme dans les constructions en bois. En effet, au lieu d’utiliser des procédés élaborés de formage du bois, les concepteurs ont compté sur les forces naturelles, plus durables, pour amener le bois à prendre une forme précalculée.

Urbach Tower
Il est possible d’entrer dans la tour d’Urbach qui protège les visiteurs du vent et leur apporte chaleur et refuge. Avec l’aimable autorisation de ICD/ITKE, Université de Stuttgart.

Deux experts sont à l’origine du projet. Le premier, Dylan Wood, est à la tête d’une équipe de recherche sur la programmation de matériaux à l’institut allemand (ICD) de l’université de Stuttgart. Le second, Markus Rüggeberg, qui dirige le laboratoire Cellulose et matériaux du bois de l’institut de recherche suisse EMPA, est à l’origine de plusieurs projets dans le cadre de l’expérience de construction NEST, à Zurich.

« Le bois est un matériau très durable, et d’autant plus efficace lorsqu’il est cintré », explique Dylan Wood. Ainsi, les chercheurs ont réussi, grâce à la programmation, à rendre l’utilisation du bois encore plus attrayante en termes de durabilité.

La très grande précision des simulations sur ordinateur

Prefabricated wooden parts of Urbach Tower
Les éléments en bois préfabriqués de la tour d’Urbach ont été assemblés sur site en un seul jour. Credit : ICD/ITKE, Université de Stuttgart.

Pour comprendre comment la programmation de matériaux fonctionne, il est important de savoir que, de la même manière que les machines peuvent être programmées pour effectuer certains mouvements, le bois peut être « programmé » pour se déformer d’une certaine façon au cours du séchage. Avec les simulations sur ordinateur, les architectes anticipent ces déformations, et sont donc à même de calculer la quantité exacte de bois et d’humidité nécessaires pour obtenir une certaine forme.

Dès que les données d’une conception sont définies, comme le taux d’humidité ou l’épaisseur souhaitée, le processus de formage peut commencer. On colle d’abord une fine couche de bois sec sur une épaisse couche de bois humide, de sorte que les nervures de l’une soient perpendiculaires à celles de l’autre. Cela stabilise l’élément en question, de sorte que le bois prend exactement la forme géométrique déterminée sur ordinateur à l’avance, lorsque l’eau s’évapore et que le bois sèche. Une fois ce processus achevé, le bois conserve sa forme cintrée.

Plus besoin d’assemblage pour les meubles autoformés et bien plus

L’équipe est déjà en train de développer de nouvelles méthodes visant à autoformer de plus grands éléments de construction, comme les panneaux de toitures, directement sur site. Ils ont même récemment dévoilé un concept de meuble en kit, qui à former chez soi, sans assemblage, outil, ou instruction.

« La beauté de ce type de processus, c’est que les outils numériques nous permettent d’inscrire une forme précise directement dans le matériau d’un composant lors de sa fabrication, » continue Dylan Wood. « Cela pourrait réduire radicalement le recours aux machines sur chantier, ainsi que l’impact de la construction sur l’environnement. En somme, c’est une méthode de construction plus propre et moins bruyante, indiquée pour les projets dont le coût en équipements et en main d’œuvre est prohibitif. Au lieu de cela, on dirige les matériaux pour qu’ils réalisent les gros travaux complexes.

La cerise sur le gâteau, c’est qu’il suffit de comprendre le fonctionnement d’un matériau naturel et de savoir comment le manipuler. Pour les chercheurs, c’est l’exemple parfait de l’essence de l’industrie 4.0 : un processus de fabrication flexible et adaptable basé sur la numérisation, la catégorisation et l’organisation de matériaux naturels afin de former différents produits et configurations géométriques. »

Friederike Voigt

À propos de Friederike Voigt

Friederike Voigt est l’un des chargés de contenu d’Autodesk et elle gère la région EMEA de Design & Make with Autodesk. Avant cela, elle était journaliste. Au cours de ses études en gestion des médias et en histoire de l’art, elle a obtenu une bourse nationale en journalisme et a travaillé pour divers journaux et magazines, dont l’Agence de presse allemande (dPa) et le magazine Cicero.

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