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Pourquoi l’impression 3D craint… et comment y remédier

Entendons-nous bien. L’impression 3D présente de nombreux avantages. Elle permet de fabriquer toutes sortes d’objets, quel que soit leur niveau de complexité. Sa précision est extrême. La portée de ses applications n’est limitée que par notre imagination. Surtout, elle allait accomplir la prophétie qui annonçait l’avènement de la personnalisation de masse.

Mais la prophétie ne s’est pas réalisée. Rappelez-vous : cette technologie était censée révolutionner le secteur de la production, mettre la créativité entre les mains de tout le monde, ébranler le modèle de production traditionnel ! Il y aurait une imprimante 3D dans chaque foyer !

Or jusqu’ici, pour la plupart, les gens sont encore sur la partie gauche de la courbe du «  », au niveau du pic des attentes exacerbées par l’emballement médiatique et en route vers le gouffre des désillusions.

Je n’ai pas renoncé pour autant. Je crois toujours en cette prophétie, mais il est temps de dépasser le stade des conjectures et de faire décoller le marché de l’impression 3D.

Afin de mieux cerner la question, voici les 5 reproches principaux que j’adresserais actuellement à l’impression 3D.

kid watching 3D printer

N° 1 — L’impression et sa qualité

Cela peut paraître élémentaire, mais de nombreux problèmes sont liés à la qualité de l’impression 3D :

  • La fragilité et le décollement des pièces imprimées par dépôt de matière fondue (FDM),
  • La faible résolution,
  • Les matériaux.

Il est vrai qu’on ne choisit pas les matériaux en fonction de leur utilisation finale, mais parce qu’on peut les extruder, les faire fondre ou les faire couler. Et même s’il existe des exemples de plurimatériaux, on n’en emploie généralement pas plus de deux en même temps. Pour résumer, nous nous posons trop de contraintes.

Je ne veux pas freiner mon imagination. Je veux une imprimante qui me permette de créer des matériaux qui n’existent pas en dehors de l’imprimante. Je veux celle qui fabrique directement les alliages.

Voici un exemple qui devrait soit cristalliser le problème soit vous révéler mon âge : vous souvenez-vous du « plastique fou » ? On découpait des modèles dans ces feuilles de plastique, puis on les mettait au four pour réduire leur taille, et finalement… Le résultat n’en valait pas vraiment la peine.

Voilà où je souhaite en venir : l’engouement pour l’impression 3D doit passer d’un « Regardez, j’ai créé quelque chose ! » à un « Regardez ce que j’ai créé ! ». L’objet doit toujours être de haute gamme, imprimer avec des matériaux d’excellente qualité et surtout ne pouvoir être produit autrement.

N° 2 – La fonctionnement n’est pas fiable

La complexité même de l’impression 3D peut être décourageante. Elle implique de jongler avec trop de formats, de paramètres et de réglages mécaniques.

Vous connaissez probablement cette blague : « Pourquoi les boîtiers d’imprimantes 3D sont-ils transparents ? Pour pouvoir admirer les plantages ! »

Certes, il s’agit de voir comment l’impression se déroule, mais c’est surtout pour pouvoir intervenir quand l’impression tourne mal.

Certaines personnes installent même des caméras pour surveiller leurs imprimantes ! Accepteriez-vous d’attendre debout qu’une imprimante 2D veuille bien effectuer ses tâches ? Bien sûr que non.

Il est temps de mettre fin à cette obsession des imprimantes 3D et de leur fonctionnement, et de nous consacrer à l’objet de l’impression. Qui se soucie de savoir si on a une super imprimante 3D et si on s’amuse bien pendant qu’elle marche ? Moi, ce qui m’intéresse, c’est le résultat !

3D printing gear

Je rêve du jour où les imprimantes 3D ne seront plus transparentes, mais où les étapes qui séparent la conception de la fabrication finale seront plus claires. Lorsque la technique sera vraiment fiable et de grande qualité, l’impression 3D connaîtra alors le fabuleux destin d’une technologie réussie : une omniprésence et une invisibilité. Un simple boîtier noir, ennuyeux.

Le but ultime serait d’aboutir à une « impression en un clic » qui soit fiable. Pour y parvenir, nous aurions besoin de ce qu’étaient PostScript ou LaserWriter à la publication assistée par ordinateur : un catalyseur. Voilà ce qu’il va falloir pour mettre cette « révolution » en marche.

N° 3 — Le déroulement des tâches

Le « workflow » de l’impression 3D est ancien, démodé, et reste basé sur un flux linéaire classique :

  • L’humain pense ;
  • L’ordinateur fournit les données et les analyse.

Avec l’impression 3D, le déroulement des tâches ne profite pas de la conception générative ou des autres innovations récentes de ce type. Pour l’instant, les concepteurs dessinent leur projet, puis le robot doit à nouveau le dessiner dans l’imprimante 3D.

Cela signifie qu’on continue de dessiner les mêmes pièces, tout en espérant que le résultat de l’impression sera unique. Tant que leur aptitude au dessin constituera une entrave, ils n’exploiteront pas toute la puissance de l’impression 3D.

Il serait pourtant préférable de déléguer à l’ordinateur une plus grande part des tâches de conception. En fait, une telle attitude permettrait au logiciel de proposer des modèles bien plus élaborés que ceux qu’on pourrait imaginer.

Mais l’attitude traditionnelle qui exige que le concepteur fasse tout le travail, fait que le résultat de ses efforts sera toujours assujetti à des contraintes de temps, de finances et de patience. Il se cantonne souvent à une ou deux options, puis imprime tout simplement la meilleure des deux, et non la meilleure possible.

Changeons d’attitude : les concepteurs doivent arrêter de considérer leurs ordinateurs comme de simples outils de dessin. Ils ne sont pas uniquement là pour l’exécution. On devrait étendre le champ de leurs tâches.

N° 4 – On se trompe de but

Ce serait mon quatrième reproche : dans le domaine de l’impression 3D, les efforts ne se concentrent pas sur le bon objectif.

Chacun se contente de la création de prototypes, de pièces de rechange et de bibelots, sans considérer le but ultime : l’objet final et la création de solutions novatrices pour résoudre des défis bien plus importants.

Pour y parvenir, il faut considérer l’impression 3D dans son ensemble, à travers quatre facettes de la fabrication additive : les pièces, le système, les matériaux et les processus.

Dans d’autres procédés de fabrication, vous pourriez dissocier ces quatre éléments et les optimiser séparément. Mais dans l’impression 3D, ils sont tous liés car le rôle de chacun d’entre eux a une incidence sur celui des autres. La meilleure façon de réaliser un assemblage se fait dans les matériaux. Les ressors, les leviers, les charnières ou les amortisseurs peuvent être obtenus, non seulement en tant que pièces individuelles, mais aussi dans l’élaboration de matériaux intelligents. La clef est dans la relation entre les éléments qui interagissent.

3D-printed lattice

Imaginez un moteur de voiture de course. Un ingénieur propose d’imprimer les têtes de soupape en 3D en utilisant un astucieux maillage léger. Elles coûteraient plus cher que les pièces fraisées habituelles. L’idée lui semble donc mauvaise. Puis il se rend compte qu’une tête de soupape plus légère implique un ressort de rappel plus petit, soit une tige de valve plus courte et une usure plus faible de la courroie de transmission. Un matériau moins coûteux peut donc être utilisé et l’ensemble du moteur est alors plus petit et la taille du compartiment s’en trouve réduite. Au final, le moteur est donc moins cher et plus performant.

L’ingénieur aurait pu rater cette opportunité s’il s’était contenter de réaliser des améliorations avec l’impression 3D. Ce que je veux donc dire quand on se trompe de but, c’est que les concepteurs devraient viser plus haut et penser plus loin.

N° 5 — Un marché mature prématurément

Mon dernier reproche serait que les fabricants d’imprimantes 3D semblent vouloir consolider les normes de façon prématurée et freiner l’innovation. Pourtant, le marché de l’impression 3D reste « prématurément mature ».

Les fabricants se trompent et prennent malheureusement la baisse actuelle pour la chute à venir. Les clients du moment sont les convaincus, pas la majorité. Pourtant, les fabricants appliquent le modèle d’un marché où il y aurait déjà une imprimante dans chaque foyer.

Mais c’est de la folie, car nous n’en sommes encore qu’à la première étape, où une innovation ouverte devrait toujours prédominer. Au lieu de cela, on voit des fabricants placer des puces d’identification dans des cartouches pour qu’elles ne puissent être rechargées ou utilisées ailleurs.

En agissant ainsi, on se concentre sur la vente d’appareils, puis on commence à agir de façon étrange, en imprimant des manuels d’utilisation et de dépannage, au lieu de répondre à la demande du client, qui justement veut s’en débarrasser !

Penser ainsi conduit à une impasse car on place ses intérêts avant ceux du client. Tout le monde doit prendre conscience du fait que pour l’instant, le marché n’est pas innovant.

Finalement, pour éviter ces reproches, il faudrait que les concepteurs résolvent les problèmes en trouvant des solutions nouvelles, en faisant moins d’efforts, pour produire plus de résultats, davantage d’expression, une fiabilité et une confiance accrue, et de la qualité.

Place désormais à l’innovation et à la prochaine évolution du marché de l’impression 3D !

À propos de l'auteur

Entrepreneur chevronné, Jeff Kowalski s'est forgé la réputation de promouvoir la diversité des idées au sein du groupe dans les domaines de la technologie, des affaires et de l'entreprise, provenant de sources diverses, qu'il s'agisse d'ingénieurs, de techniciens, de spécialistes du marketing, d'experts en stratégie d'entreprise, etc. Il détient une maîtrise en génie électrique et une maîtrise en informatique, toutes deux de l'Université Cornell. Jeff Kowalski aime aussi jouer de la musique et passer du temps avec sa famille à Berkeley, en Californie.

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